Laurence Ré, 26 ans, une Française qui étudie le stylisme à Auckland.

LES PHOTOS EN CLIQUANT SUR CE LIEN OU DANS LE MENU PORTRAITS : LAURENCE RE, (cliquer sur l’une d’entre elle pour faire défiler les photos en grand format).

Laurence apprend à coudre dans son école de stylisme à Auckland

C’était le dimanche 6 juin 2010 chez Chantal, où Laurence habite. L’été en France; l’hiver ici. Une belle villa d’où on peut apercevoir la mer, comme beaucoup d’autres habitations à Auckland. Laurence vit depuis 2 ans et demi en Nouvelle-Zélande, après avoir grandi et vécu en région parisienne pendant 24 années.

Peux-tu nous expliquer ta situation ici? Depuis combien de temps tu es là? Et quel est ton parcours ?

Je suis arrivée début 2008 avec un « Working Holiday Visa ». Cette première année, j’ai voyagé à travers tout le pays. Afin de pouvoir vivre, je trouvais des petits boulots de façon temporaire tels que travailler dans un supermarché, ramasser les fruits, être femme de ménage, vendeuse dans une galerie d’art… Bref mon CV à doublé en l’espace d’un an !

À "Bethells Beach", une plage à l'état sauvage à 40 minutes en voiture d'Auckland... Une vraie escapade, pourtant si proche de la ville...

Après une année passée à bouger tous les trois mois (Wellington, Queenstown…) j’étais fatiguée et voulais me poser. En janvier, je suis donc arrivée sur Auckland. Je voulais m’y installer car, venant de la région parisienne, il me fallait vivre dans une grande ville et aussi parce que j’ai un oncle qui y habite. J’ai alors trouvé un travail en tant que caregiver (donneur de soins), c’est à dire « aide-soignante à domicile » pour des tétraplégiques, autistes… En France, j’étais infirmière mais, ici, je ne pouvais pas travailler en tant que telle car le diplôme n’est pas reconnu. Il m’aurait fallu passer des équivalences, ce qui ne me tentait pas vraiment. J’ai donc travaillé avec plusieurs familles néo-zélandaises, dont des Maoris. Je restais parfois 24 heures d’affilée chez eux. Ceci m’a permis de vraiment les découvrir, leur maison, leur façon de vivre, leurs coutumes…Ce fut une très bonne expérience pour moi. J’ai pu me rendre compte des différences socio-culturelles qui peuvent exister entre ici et là d’où je viens. Comme, par exemple: l’éducation donnée aux enfants, l’alimentation, les habitudes de vie, la vie en famille…

Jusqu’au jour où une amie qui faisait du cinéma est venue me rendre visite et ceci a été un déclic pour moi. Je ne me voyais pas rester indéfiniment dans cette situation. En effet, être infirmière n’était pas tout à fait ce que je voulais faire… Depuis gamine, j’ai toujours eu dans la tête l’envie de faire quelque chose dans le domaine de la mode.

Donc me voilà lancée depuis 6 mois maintenant dans des études de mode. J’étudie a l’institut New Zealand Fashion Tech pour l’obtention du diplôme « Fashion Technology ». Je suis trois cours différents : le premier où j’apprends l’aspect technique (les

Pendant la pause de midi, Laurence joue aux dominos avec ses camarades kiwis.

machines à coudre), ensuite je vais apprendre à faire les patrons, et enfin je vais apprendre à créer ma ligne de vêtements… !

Où as-tu vécu pendant tout ce temps ?

Durant mon voyage dans le pays, je suis allée de colocation en colocation…

De même une fois arrivée sur Auckland. C’est une façon de vivre très courante ici.

Ensuite j’ai emménagé dans mon propre appartement. J’ai enfin vécu seule pour la première fois de ma vie.

Depuis que j’ai repris les études je ne peux plus m’offrir ce loyer. J’habite donc chez Chantal et son mari. Chantal est une Française (d’un père français et d’une mère américaine) qui vit depuis 16 ans en Nouvelle Zélande. Son mari est anglais. Je l’ai rencontré en arrivant à Auckland via le réseau français: il y a à Auckland des apéros organisés par une association qui réunit les français-aucklandais : « Auckland accueil ».

Pourquoi as-tu décidé de partir de France ?

Parce que je n’en pouvais plus : mon travail, le stress… Je travaillais en service de cardiologie. En deux ans, j’ai vu ma charge de travail augmenter considérablement, mais pas la paye bien sûr. En France, les infirmiers ne sont pas reconnus pour ce qu’ils font. Ceci m’a grandement dégoûté du métier.

J’avais besoin de tout changer. J’avais envie de partir, de m’éloigner, de voyager, d’expérimenter l’inconnu tout simplement.

Après une petite promenade jusqu'en haut d'une colline à Bethells beach le point de vue offre un paysage magifique.

Étais-tu déjà partie de France avant ?

L’été précédent mon départ je suis partie pendant un mois au Canada, toute seule en vacances. C’était mon premier pas vers cette aventure ! En rentrant en France, j’ai très vite senti qu’il y avait un malaise quelque part, qu’une donnée était fausse. J’ai

Les mains de Laurence dessinent un patron à la craie.

réalisé que j’étais trop jeune pour avoir la vie que je menais : métro, boulot, dodo. Trois semaines après j’ai posé ma démission ! Merci le Canada !!!

En ce qui concerne les papiers administratifs, quel statut as-tu qui te permette de rester ici au-delà de la traditionnelle année de Visa Vacances Travail ?

J’ai le statut étudiant, qui me permet de rester ici tant que je suis étudiante. En 2ème année je vais être à moitié en stage et à moitié en cours. Je compte éventuellement là-dessus pour être employée puis sponsorisée pour pouvoir rester.

Aimerais-tu obtenir la résidence ?

La voiture est indispensable pour se déplacer à Auckland.

Pas forcément… Après mes études j’aimerais bien rester encore un ou deux ans, puis rentrer en Europe ou partir vivre dans un autre pays. Mais bon, on ne sait jamais de quoi est fait demain. J’étais sensée rester quatre mois, et voilà plus de deux ans maintenant que je suis ici.

Que te manque-t-il de la France ?

Je ne sais pas… C’est une façon de vivre, une culture, la famille, la nourriture !

Je ne peux pas claquer la porte d’un pays où j’ai vécu pendant 25 ans. Je me sens toujours rattachée à la France. Je reste en contact avec ma famille, on se parle tout le temps sur internet.

Petite marche

Je pense rentrer plus tard quand je voudrai me poser, avoir des enfants, construire une famille.

Mon expérience en tant qu’infirmière m’a appris que la vie peut-être très courte. Et de ce fait, qu’il faut en profiter avant qu’il ne soit trop tard.

Pour l’instant, je me plais ici. J’aime vivre dans un pays étranger. Tous les jours j’apprends des choses nouvelles. Il m’est difficile de stagner dans une « routine ».

Que vois-tu comme différences culturelles entre la France et la Nouvelle Zélande ?

Des tas !!!

Pour moi, la Nouvelle Zélande est un pays jeune, pluriculturel qui se construit et avance grâce à cette variété de nationalités. Asiatique, indienne, polynésienne, maori …

Tandis que la France est un pays très ancré dans son histoire, sa culture qui ne change pas si vite.

Les « Kiwis » sont très gentils et accueillants. Cela dit, j’ai du mal à créer des amitiés profondes avec eux, telles que je peux avoir avec des Français ou d’autres étrangers que j’ai rencontrés ici.

Comment vis-tu ton émigration ?

Très bien ! J’apprécie le coté relaxe de la Nouvelle Zélande.

As-tu plus d’amis français alors ?

Je connais beaucoup de Français effectivement, et on se connaît plutôt tous les uns les autres. Nous restons beaucoup entre Français. Peut être une sorte de fraternité.

Les ciels néo zélandais sont souvent très impressionnant.

Qu’as-tu conservé de ton « identité nationale » ?

Je considère que ton identité tu la gardes à vie. Quand on grandit quelque part ceci nous reste à vie. Les années passées lors de notre jeunesse sont des années fondatrices. Je me sens une Française avant tout.

Te sens-tu intégrée à ton nouveau pays, ta nouvelle ville, sa politique, les communautés locales, la culture, la langue, les traditions ?

laurence vit chez Chantal dans une jolie villa, comme de nombreuse autres en Nouvelle Zeélande, avec vue sur la mer.

Oui, j’adore Auckland. À Paris ce qui me manquait c’était de ne pas voir la mer. Ici on la voit partout! Ca me donne l’impression d’être constamment en voyage.

Par rapport à la politique c’est une chose dans laquelle je ne me suis jamais investie, ni en France, ni ici.

Sinon pour les communautés locales, je ne fais rien de particulier.

Quant à la culture, je me rends compte que je commence à être imprégnée…par des petits trucs tout bêtes !

Par exemple m’habiller en jogging pour aller au travail, ouvrir une bouteille de vin en la dévissant… Passer mon temps à envoyer des textos parce que c’est trop cher d’appeler. Boire un verre de vin quand je sors dans un bar (en France j’avais pour habitude de boire une bière ou un cocktail, le vin étant pour le repas…), laver la vaisselle sans la rincer …Pas bien, je sais !

Pour la langue je parle le « franglais » ! Les trois premiers mois j’ai eu un peu de mal mais maintenant ça n’est plus une barrière. Il y a parfois du vocabulaire que j’oublie, mais ça va.

As-tu déjà ressentie une quelconque discrimination ?

Le mur de Laurence à son école.

Oui, une fois. Quand je travaillais dans les vignobles, un des employeurs ne nous a pas payés. Mais, après un mois, je suis allée le menacer en disant que ça n’était pas parce que nous étions étrangers et que ne connaissions pas bien le système qu’il ne devait pas nous payer, et que j’allais aller au département du travail le dénoncer. Le lendemain j’avais l’argent sur mon compte !

Sinon, je pense que les Français sont bien acceptés et les « Kiwis » sont très accueillants.

Vis-tu entourée de locaux ou d’étrangers ?

Chez moi non ! Mais à l’école je suis la seule Française.

Te sens-tu plutôt française ou citoyenne du monde ?

Je ne sais pas… Je dirais plutôt une Française dans l’âme, dans mes gènes et une citoyenne du monde dans mon mode de vie.

À quelle fréquence rentres-tu en France ?

Je ne suis rentrée qu’une seule fois depuis que je suis partie. Il m’a fallu du temps pour me sentir prête à faire le pas dans l’autre sens.

Question bonus : que recommandes-tu aux gens qui viennent visiter la Nouvelle-Zélande ?

Laurence dessine un patron.

Si vous aimez la nature c’est ici qu’il faut venir !

J’aime être émerveillée par un paysage paradisiaque complètement inattendu après avoir conduit pendant une heure sans rien voir de particulier .

Un truc tout bête : naviguer, faire un barbecue sur la plage…

Mon endroit préféré : Cathedrale cove dans les Coromandels (île du nord).

****

Leave a Reply